DŽgŽnŽrescence Maculaire LiŽe ˆ lÕAge  (DMLA)

DÕaprs un exposŽ du Dr Michel Zeitoun

SŽance de FMC du jeudi 2 dŽcembre 2010

1.  Pour comprendre cette maladie de la rŽtineÉ

1.1.     LÕÏil

Il ressemble ˆ un appareil photo ; lÕimage que nous observons doit dÕabord traverser la cornŽe transparente ou Ç hublot È de lÕÏil. Puis, pour faire rentrer un immense paysage dans notre petit Ïil, il faut une lentille qui rŽduise lÕimage perue. Cette lentille reste longtemps claire comme du cristal dÕo son nom  de cristallin.

1.2.     La rŽtine

CÕest la pellicule photo qui, sans cesse, enregistre les images et les transmet au cerveau par le nerf optique ; notre rŽtine comporte deux sortes de cellules recevant la lumire appelŽes photorŽcepteurs :

á     5 millions de c™nes

á     92 millions de b‰tonnets.

En pŽriphŽrie de la rŽtine, les b‰tonnets plus nombreux permettent la vision des mouvements dans lÕespace ainsi que la vision nocturne.

 

 

1.3.     La macula

SituŽe au centre de la rŽtine, la macula, petite comme une tte dՎpingle, est constituŽe de nombreux c™nes et de moins de b‰tonnets. Les c™nes permettent de discerner les fins dŽtails de jour et de diffŽrencier les couleurs. CÕest la macula qui permet la lecture et lՎcriture.

Au centre de la macula, se trouve la fovŽa, zone de la vision fine par excellence car elle nÕest constituŽe que de c™nes et ne prŽsente aucun vaisseau contrairement au reste du tissu rŽtinien.

La macula puise son oxygne et ses nutriments indispensables ˆ son bon fonctionnement au niveau dÕune importante tunique trs vascularisŽe, la choro•de situŽe en profondeur.

Seules une couche de cellules pigmentŽes, lՎpithŽlium pigmentaire et une membrane feuilletŽe, membrane de Bruch, sŽparent les c™nes et les b‰tonnets des vaisseaux  de la choro•de.

Un pigment maculaire jaune (riche en lutŽine et zŽaxanthine) permet de protŽger cette zone privilŽgiŽe de la vision.

2.  Avec le temps le vieillissement de lÕÏil est inŽluctable.

Notre rŽtine vieillit avec

-       une diminution du pigment maculaire jaune

-       un vieillissement des c™nes, des b‰tonnets, de lՎpithŽlium pigmentaire et de la choro•de.

2.1.     Stade prŽcurseur de DMLA ou Maculopathie liŽe ˆ lÕage (MLA)

2.1.1. Les diffŽrents aspects

Le vieillissement de la macula ou Maculopathie LiŽe ˆ lÕAge peut prendre plusieurs aspects  visibles au FO dont les plus frŽquents sont :

-       LÕapparition de taches blanches ou drŸsens correspondant ˆ lÕaccumulation de dŽp™ts lipidiques sous la rŽtine, bien visibles au fond dÕÏil sous forme de t‰ches blanches plus ou moins larges et confluentes 

-       LÕapparition dÕaltŽrations de lՎpithŽlium pigmentaire associant des petites zones atrophiques blanches et des zones plus pigmentŽes noires ou grises

-       LÕaccumulation centrale de matŽriel (lipofucine) ressemblant ˆ un Žnorme drŸsen central


 

 


(image provenant du N Engl J Med 2006;355:1474-85.

 

A ces stades lˆ, le vieillissement de la macula nÕentra”ne pas de modification de la vision et pendant trs longtemps (parfois des annŽes) ces atteintes restent muettes et ne peuvent tre dŽcouvertes que par un examen du fond dÕÏil.

Leur dŽcouverte lors dÕun examen de dŽpistage chez un ophtalmologiste ne doit pas tre source dÕangoisse mais doit conduire ˆ une prise en charge mŽdicale et ˆ une autosurveillance pour dŽpister toute anomalie signant un passage vers la dŽgŽnŽrescence plus grave.

2.1.2. Les facteurs de risqueÉ

Certains facteurs influent sur le vieillissement de lÕÏil. Ils peuvent tre gŽnŽtiques ou dŽpendants de lÕenvironnement.

DÕautres comme le tabac, le surpoids, lÕHTA et les troubles des mŽtabolismes des lipides (tels que le cholestŽrol et les triglycŽrides) peuvent aggraver une maculopoathie liŽe ˆ lՉge. Ainsi il est donc important de lutter contre ces facteurs en :

-       Arrtant la consommation de tabac

-       Diminuant la surcharge pondŽrale

-       Surveillant lՎquilibre tensionnel

-       Normalisant les paramtres lipidiques

-       Se protŽgeant du soleil par le port de verres filtrant les U .V, de visire ou de casquette.

2.1.3. Les anti-oxydants

Toute la vie lÕexposition de lÕÏil ˆ la lumire est constante. Cette lumire induit lÕapparition de substances agressives, les radicaux libres qui, avec lՉge, ne sont plus correctement ŽliminŽs, accŽlŽrant le vieillissement de lÕÏil. Il est donc recommandŽ de diminuer la production de ces radicaux libres gr‰ce ˆ des antioxydants.

NŽanmoins, au stade prŽcoce de maculopathie, aucune Žtude nÕa prouvŽ lÕefficacitŽ  dÕune supplŽmentation en antioxydants par comprimŽs. Cependant il appara”t raisonnable dÕobŽir aux conseils diŽtŽtiques visant ˆ majorer les apports en antioxydants.

Les principaux antioxydants sont :

-       La vitamine C (retrouvŽe dans les lŽgumes et fruits colorŽs rouges, jaunes, verts : poivrons,  agrumes, kiwis, fraises, cassis, goyaves)

-       La vitamine E (dans les huiles et margarines vŽgŽtales, les olives noires, le ma•s et les germes de blŽ)

-       Les oligoŽlŽments comme le zinc et le cuivre (le foie, les lŽgumes secs, le pain complet, les Ïufs et les crustacŽs)

-       La lutŽine (pigment jaune ayant un double r™le protecteur : filtre de la lumire bleue et  effet antioxydant  de pige de radicaux libres) et la zŽaxanthine (prŽsentes dans les lŽgumes verts comme les Žpinards, les choux frisŽs, la laitue, lÕoseille, le cresson, les haricots, les courgettes, les brocolis)

-       Les acide gras, omŽga 3, prŽsents dans tous les poissons.

2.1.4. Lorsque lÕophtalmologiste a trouvŽ au FO des signes de maculopathieÉ

La grille de AmSler

Il faut apprendre au patient ˆ reconna”tre les signes dÕaggravation et ˆ pratiquer une autosurveillance de sa vision.

CÕest un test de dŽpistage simple ˆ faire rŽgulirement, qui Žvalue la qualitŽ de la vision de prs ; il s Ôeffectue Ïil par Ïil en utilisant une grille type grille de mots croisŽs ou, en mettant les lunettes de prs et en cachant un Ïil, ˆ la recherche dÕondulations des lignes verticales et/ou horizontales  ou de taches noires.

 

Grille de AMSLER - Normale

Grille de AMSLER - Maculopathie

LEAD Technologies Inc. V1.01

Image of Small Amsler Grid with wavy, distorted lines - how it may appear to someone with AMD

 

On peut aussi contr™ler sa vision de prs en lisant un texte calibrŽ pour la lecture de prs pour dŽtecter la disparition de lettres au sein dÕun mot, une anomalie de taille des lettres ou une dŽformation.

Ces troubles de la vision dÕun Ïil, minimes au dŽbut ne seront pas dŽtectŽs si on ne fait pas ce type de test car longtemps, lÕÏil non atteint compense les dŽfauts de lÕÏil malade.

Ainsi, ˆ la moindre anomalie de la vision de prs, il faut consulter rapidement un ophtalmologiste pour un examen du FO ˆ la recherche des signes prŽcurseurs de maculopathie sus dŽcrits, pour ensuite faire pratiquer  rapidement des examens complŽmentaires permettant une imagerie fine de la macula : lÕOCT et peut tre une angiographie.

LÕOCT ou Tomographie par CohŽrence Optique

CÕest une nouvelle technologie crŽŽe en 1990 et vraiment diffusŽe depuis 2005, reposant sur la rŽflexion de la lumire sur le fond de lÕÏil (photo a).

Cet examen non invasif et indolore se fait en ambulatoire  en cabinet ou en service hospitalier. Rapide ˆ effectuer, il permet de visualiser les diffŽrentes couches  de cellules de la rŽtine.  

LÕOCT est cotŽe 47.88 euro lÕÏil, 71.82 euro pour les 2 yeux, (en secteur 1).

LÕOCT permet donc de visualiser des signes de maculopathie parfois non encore visibles au FO.

Ainsi au stade prŽcoce des drŸsen (visibles au FO), o il nÕy a encore aucun sympt™me clinique, lՎpithŽlium pigmentaire  (apparaissant sous forme dÕune ligne orange  continue et rŽgulire) peut appara”tre un peu irrŽgulier.

A un stade ultŽrieur, apparaissent des bosselures de cet ŽpithŽlium (photo b), et il faudra alors bien visualiser les abords de la fovŽa, car alors si les Žlevures sont proches de la fovŽa les sympt™mes peuvent appara”tre.

2.2.     DMLA atrophique ou sche

Plus tardivement peut appara”tre une DMLA atrophique o lՎpithŽlium pigmentaire devient de plus en plus mince et se troue littŽralement rŽalisant des plages dÕatrophie.

Les photo-rŽcepteurs disparaissent dans les zones atrophiques avec une atteinte visuelle plus ou moins sŽvre selon la localisation, les atteintes centrales (fovŽolaires) Žtant les plus sŽvres.

Il sÕassocie des migrations pigmentaires vers les couches internes de la rŽtine.

Cette phase, appelŽe phase sche de la DMLA Žvolue lentement, mais peut se compliquer d'une nŽovascularisation;

2.3.     DMLA nŽovasculaire ou humide

Au stade ultŽrieur, il se produit un dŽcollement de lՎpithŽlium pigmentaire ˆ cause dÕune nŽovascularisation venant de la choro•de, avec une poche  bien visible en OCT.

2.3.1. Au stade initial

LÕexsudation des nŽovaisseaux soulve alors progressivement la rŽtine (dŽcollement sŽreux rŽtinien) causant une altŽration modŽrŽe de la vision et des mŽtamorphopsies (ondulation des lignes droites)

CÕest le stade sous ŽpithŽlial, ou occulte car les nŽovaisseaux sont encore situŽs sous lՎpithŽlium pigmentaire et ne sont pas visibles en angiographie.

CÕest ˆ ce stade, qui dure quelques mois,  quÕil faut traiter car les photorŽcepteurs ne sont pas encore altŽrŽs.

2.3.2. Stade ultŽrieur

A ce stade, les nŽovaisseaux envahissent et dŽsorganisent la rŽtine en perant et dŽpassant lՎpithŽlium pigmentaire avec Ïdme et hŽmorragie possible et dŽsorganisation fatale des photorŽcepteurs en quelques semaines.

DŽformations et baisse de la vision apparaissent rapidement. La lecture devient impossible.

Le patient ˆ tendance ˆ accuser ses lunettes, sans se douter du drame qui se joue. C'est donc une urgence ˆ rŽfŽrer ˆ l'ophtalmologiste du patient, qui l'orientera Žventuellement pour l'OCT et le traitement.

CÕest ce quÕon appelle la  DMLA de type prŽ-ŽpithŽliale ou Ç visible È car lÕangiographie montre clairement les nŽo vaisseaux. 

 

 

3.  TRAITEMENT

Les anti-angiogŽniques

CÕest un peu le hasard qui a permis de dŽcouvrir un traitement il y a quelques annŽes : un ophtalmologiste amŽricain porteur dÕune DMLA et dÕun cancer du c™lon avait remarquŽ que dans les semaines qui suivaient sa perfusion dÕAVASTINª, sa vision sÕamŽliorait. Les chercheurs ont ensuite cherchŽ un produit similaire ˆ injecter dans lÕÏil, pour Žviter les effets gŽnŽraux : les antiVEGF.

Ce sont des produits trs onŽreux, pegaptanib (LUCENTISª) et ranibizumab (MACUGENª). Ils sont entirement pris en charge par la SS (1000 Û la dose) prescrit par lÕophtalmologiste sur ordonnance dÕexception. Dans certains centres, on se contente de reconditionner l'AVASTINª pour l'injection intra-vitrŽenne, ce qui est aussi efficace et meilleur marchŽ, mais n'a pas l'AMM.

Handmade Software, Inc. Image Alchemy v1.14
LÕinjection se fait  au bloc opŽratoire, sous anesthŽsie locale, en intravitrŽen pour inactiver le nŽovaisseau ; en rgle gŽnŽrale, les 3 injections sont faites espacŽes dÕun mois, puis lÕOCT et lÕamŽlioration ou non des images guidera le rythme des injections ultŽrieures. La frŽquence des injections dŽpend de chaque cas ;

Les suites opŽratoires sont parfois marquŽe par une hŽmorragie sous conjonctivale importante, pouvant durer deux semaines, sans gravitŽ ;

La complication ˆ redouter est lÕinfection de lÕÏil, rare (1/4000 injections), suspectŽe en cas de vision trouble et dÕÏil douloureux.

LÕamŽlioration de la vision, la diminution des dŽformations visuelles traduisent lÕefficacitŽ du traitement. Mme aprs une guŽrison par inactivation du nŽovaisseau (avec parfois quasi normalisation des images en OCT, il faut craindre une rŽcidive.

Le contr™le par OCT reste donc incontournable, complŽtŽ ou non par une angiographie selon les cas, permettant de surveiller le nŽovaisseau et sa cicatrice fibreuse, active ou non, et dՎtudier si la rŽtine est le sige ou non dÕune infiltration oedŽmateuse.

4.  Les Autres pathologies

LÕOCT est Žgalement utilisŽe dans dÕautres pathologies oculaires ;

4.1.     Les thromboses veineuses rŽtiniennes

Les thromboses veineuses rŽtiniennes, dont 1/3 guŽrissent seules, 1/3 ont comme sŽquelles une baisse dÕAV, 1/3 empire avec la perte de la vue), on voit ˆ lÕOCT que la rŽtine est infiltrŽe, ÏdŽmateuse.

 

Auparavant on traitait par le laser mais aujourdÕhui on amŽliore le pronostic en injectant des anti-VEGF (moins dÕinjections sont nŽcessaires que dans la DMLA); des injections intravitrŽennes de cortico•des sont Žgalement utilisŽes.

4.2.     Dans le diabte

La rŽtine appara”t ÏdŽmateuse, lÕOCT plus prŽcise guide le laser en dehors de la rŽtine centrale ; on injecte Žgalement parfois des cortico•des intravitrŽens ou des anti-VEGF si le centre (la macula) est atteint ;

De nouveaux dispositifs intravitrŽens existent aujourdÕhui ; ce sont de petits implants de dexamathasone que lÕon injecte dans le vitrŽ, tous les 6 mois environ.

 

 

 

 

 

 

4.3.     Les tractions vitrŽo-fovŽales

 LÕOCT visualise Žgalement trs bien les tractions vitrŽo fovŽaires (le corps vitrŽ sÕattache ˆ la rŽtine puis avec lՉge se dŽcolle et sÕarrache. Au pire  un trou rŽtinien central se constitue, qui doit tre opŽrŽ.

Le dŽcollement du vitrŽ  traduit par des mouches volantes, des impressions de toile dÕaraignŽe et dՎclairs lumineux. Une sensation de voile noir qui progresse doit faire consulter en urgence ˆ la recherche dÕun dŽcollement de rŽtine.

 

 

4.4.     La prŽsence dÕune membrane Žpi-rŽtinienne

 LÕOCT permet  Žgalement de visualiser la prŽsence d'une membrane Žpi-rŽtinienne en vue dÕune intervention chirurgicale, si l'acuitŽ est sŽrieusement abaissŽe.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

4.5.     Dans le glaucome

LÕexistence dÕune tension oculaire ŽlevŽe ˆ pour consŽquence est l'atteinte des fibres du nerf optique et des cellules ganglionnaires, lÕOCT permet de confirmer l'atteinte anatomique, de la comparer ˆ l'atteinte du champ visuel,  pour mieux apprŽcier le stade du glaucome et dÕen guider le traitement.

 

 

 

 

 

 

5.  CONCLUSIONS

La dŽgŽnŽrescence maculaire liŽe ˆ lՉge est une pathologie ophtalmologique multifactorielle.

Elle pose un problme de santŽ publique car elle reprŽsente la premire cause de cŽcitŽ lŽgale chez les sujets de plus de 50 ans.

Ces dernires annŽes l'arsenal diagnostic et thŽrapeutique sÕest enrichi. Ë c™tŽ de lÕangiographie ˆ la fluorescŽine, lÕutilisation de lÕangiographie au vert dÕindocyanine et de lÕOCT a permis de mieux conna”tre les formes cliniques de la maladie.

LÕOCT, par la facilitŽ de sa rŽalisation, son innocuitŽ, et l'importance des informations apportŽes dans le diagnostic et le traitement, prend une place prŽpondŽrante dans toutes les pathologies de la rŽtine, d'autant que beaucoup deviennent  curables.

LÕOCT est lÕexamen clŽ du dŽpistage et du suivi de toutes les maculopathies, ˆ rechercher ˆ partir de 50 ans et ˆ rŽpŽter ds quÕune pathologie sÕinstalle.

LÕautosurveillance des patients est Žgalement ˆ prŽconiser, ainsi que certaines mesures prŽventives (mesures hygiŽno diŽtŽtiques)

La prise en charge thŽrapeutique sÕest Žlargie avec lÕarrivŽe des traitements anti-angiogŽniques, permettant de traiter plus de patients avec des rŽsultats nets.